Gloire au Connecticut Sun : la défense comme oeuvre d’art

Il faut battre le fer pendant qu’il est chaud. C’est bien ce qu’on dit, non ? A l’heure de ces lignes, le Connecticut Sun mène toujours 1 à 0 dans sa série contre les Las Vegas Aces, après deux démonstrations de force face à Chicago et Los Angeles. Au moment où vous lirez ce qui suit, A’ja Wilson et ses copines auront peut-être retrouvé leur sens de l’orientation et leur combativité pour prendre le dessus selon la logique des choses. La fenêtre de tir est réduite et je vais me permettre de la saisir sans trop céder à la fanfaronnade.

Après avoir fait l’éloge de Julie Allemand un peu plus tôt dans la saison, j’ai eu envie de vous faire part d’un autre crush. Il ne concerne pas une joueuse en particulier, mais un concept. Un état d’esprit. Une expression collective. Celle de la défense du Sun et de son application par ses joueuses.

La défense n’est pas forcément ce qui fait “vendre”. La majorité des gens, surtout en 2020, veulent voir des orgies offensives et des superstars se tirer la bourre en attaque. Ne croyez pas que je boude mon plaisir en voyant des équipes attaquer magnifiquement bien et claquer 100 points dans un match de 40 minutes. Simplement, je suis parfois plus sensible à la beauté discrète d’un autre basket. Celui que Curt Miller demande à ses joueuses de pratiquer quasiment depuis qu’il a accepté ce job en 2016.

On ne l’a pas beaucoup vu en saison régulière, il faut le reconnaître. Il est fréquemment arrivé que le Sun, qui a quand même démarré sa saison par 5 défaites en 5 matchs, prenne le bouillon dans sa moitié de terrain, surtout en fin de rencontre. Quelle qu’en soit la cause, il y a eu prise de conscience et réveil collectif. Depuis plusieurs semaines maintenant, c’est un groupe en mission et habité par un feu intérieur incroyable qui foule le parquet toutes les 48 heures.

Il y a du talent offensif dans cette équipe, c’est évident. Mais c’est avant tout l’impact et l’intelligence défensifs du Sun qui lui a permis de créer la surprise – ou pas 😉 – sur les deux premiers tours. Le Sky et ses Vanderquigs ont été étouffés. Les Sparks et leur roster haut de gamme ont été balayées. Et sur le game 1 de leur série, en attendant la suite cette nuit, les Aces ont été littéralement concassées.

La recette paraît simple.

En regardant jouer Connecticut, on peut avoir l’impression que les joueuses sont simplement plus affûtées physiquement que leurs adversaires. Il est vrai qu’observer Alyssa Thomas sur un terrain de basket le temps d’un match peut suffire à vous faire perdre 800 calories. Si vous avez regardé ou lu l’interview qu’elle nous avait accordée en début d’année lors de sa venue en Belgique, Alyssa expliquait son approche de manière désarmante :

“J’ai toujours été comme ça. J’ai juste beaucoup d’énergie et ce sentiment que si j’élève le tempo constamment, l’autre équipe finira par s’épuiser alors que moi je pourrai continuer comme ça”.

Dans le sillage d’Alyssa Thomas, le Sun éreinte ses adversaires en harcelant la porteuse du ballon et en se ruant de manière implacable sur toutes celles qui souhaiteraient participer tranquillement à la circulation. Courir comme des dératées dans tous les sens n’a pas grand intérêt. C’est pour cela que Curt Miller ajoute à cette intensité des consignes précises sur les zones préférentielles des joueuses adverses et a beaucoup fait travailler son groupe sur la coordination de l’effort.

Regardez à nouveau les matchs contre Chicago, Los Angeles et Las Vegas. La toile déployée fréquemment par les cinq joueuses présentes sur le parquet est un régal pour les yeux.

Alyssa Thomas épuise et brutalise. Jasmine Thomas harcèle. Briann January provoque des fautes offensives comme personne dans la ligue. DeWanna Bonner utilise sa longueur pour décourager les tentatives de tir au large. Et Brionna Jones, moins mobile que ses camarades, se concentre sur la protection du cercle.

Face à chacune de ces trois équipes, le Sun a concrètement privé plusieurs des stars adverses de leur meilleure arme. En dehors de Candace Parker, toutes les autres pointures confrontées à l’obstacle Sun ont énormément souffert. Courtney Vandersloot est restée bloquée à 6 passes, Chelsea Gray, prise dans la tenaille du backcourt Thomas-January, n’en a délivré aucune et n’a presque rien mis dedans. A’ja Wilson n’a pas pu rayonner dans le mid-range comme à son habitude et a même été dépossédée de plusieurs tirs “faciles” à cause de l’agressivité de la rookie Beatrice Mompremier. Dearica Hamby, indiscutable 6e femme de l’année, a senti le souffle d’Alyssa Thomas derrière sa nuque à chaque fois qu’elle pensait pouvoir frapper.

Une preuve que ce match contre Las Vegas était une masterclass défensive ? Le tableau ci-dessous, collecté par The Athletic. D’un côté, les pourcentages d’adresse des Aces sur chaque fourchette d’éloignement au panier, lors des deux matchs de saison régulière facilement gagnés contre le Sun. A droite, et en couleur, leurs pourcentages dans ces mêmes zones lors du game 1. Si on a l’habitude de voir Vegas renâcler à l’idée de shooter à 3 points, le calvaire s’est transposé partout ou presque sur le terrain.

Source : The Athletic

A un moment, il faut aussi saluer le travail de fond réalisé par Curt Miller et son idée directrice. Sa philosophie de jeu a toujours été basée sur la défense et le recrutement effectué ces dernières années et lors de la plus récente intersaison est aligné sur ce qu’il souhaite.

L’arrivée de Briann January a beaucoup moins fait parler que celle de DeWanna Bonner, mais elle a pourtant au moins autant d’importance. Avec Jasmine Thomas, Briann January et Alyssa Thomas, le Sun peut aligner 10 présences cumulées dans des meilleurs cinq défensifs ! Le QI défensif de ces trois-là, auquel il faut ajouter celui de Bonner, dont les efforts dans ce secteur sont impressionnants, saute aux yeux.

Bill Laimbeer, qui n’est pas étranger au concept de dureté défensive, a eu deux jours pour s’adapter et pour mieux préparer ses joueuses à ce qui les attend. Si on ne sait pas toujours quel visage on va retrouver d’un soir à l’autre chez certaines équipes – on l’a vu tout au long de cette saison dans la Wubble – ce n’est pas le cas du Sun.

Faites-moi plaisir et faites-VOUS plaisir. Observez plus attentivement les déplacements et les choix des joueuses du Connecticut Sun en défense partir de la nuit prochaine. Sur Instagram, il y a le hashtag #FoodPorn, pour signaler un plat du genre orgasmique. Pour moi, l’organisation du Sun mérite le hashtag #DefensePorn.

Et si les Aces ont trouvé le moyen de réduire ça à néant, il restera toujours le souvenir de cette saison pleine d’obstacles, mais aussi et surtout pleine de promesses pour la suivante. Pour rappel, Curt Miller pourra rajouter à ce groupe assez terrifiant une certaine Jonquel Jones : deux fois meilleure rebondeuse de la ligue, une fois meilleure contreuse et membre de la All-Defensive First Team 2019.

On souhaite bien du courage aux adversaires de Connecticut en 2021.

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